Hey Lulu-neuf, la lune est ronde, les femmes sont de sorties, et les vampires aussi [PV San]

Musique

- OHOHO c'est la pleine lune, t'as vu Lulu-neuf?

Un garçon typé asiatique pointait du doigt l'énorme astre au dessus de sa tête, un animal accroché à lui en écharpe sur ses épaules semblait suivre des yeux ce que lui montrait son maître.

- C'est à cause d'elle que tu t'appelles Lulu-neuf. Quand j'ai découvert ton arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière-arrière grand mère, qui soit dit en passant n'était pas réellement ton ancètre mais bon, c'était aussi la pleine lune, c'est pour cela que je l'ai baptisé Lulu.

C'est tout en marchant gaiement que le garçon qui ressemblait en tout point à un adolescent joyeux racontait cette histoire à sa fouine. En vérité le maître de cet animal, bien que paraissant pas mal jeune avait déjà 209 ans, ce qui n'était pas rien quand même. Mais les années passaient sur lui sans y mettre une ride, et le vampire -sa vraie nature- trouvait ça génial.

- D'ailleurs c'est marrant car j'ai acquéri Lulu-trois, Lulu-six et Lulu-sept également des jours de pleine lune. Je me demande si c'est un signe. En même temps j'aurais pas pu vous avoir en pleins jours, tu sais bien pourquoi. Mais j'espère que d'ici Lulu-dix j'aurai trouvé un moyen d'aller au soleil sans mourir. C'est triste quand même tu ne penses pas? Enfin toi Lulu-neuf tu t'en fiches, le soleil tu peux le voir quand tu veux et...

Myu - car c'était ains qu'il s'appelait- s'arrêta en pleins milieu de sa phrase. En face de lui s'avançait une charmante créature. Ce n'était pas parce que c'était une fille - selon le vampire, le terme charmant pouvait s'associer aussi bien à un homme qu'à une femme - simplement qu'il la trouvait sublime comme ça à marcher sous le clair de lune, rapidement, faisant résonner ses pas sur le macadam en claquant ses talons. Des grandes jambes, une silhouette fine, et des yeux verts splendides selon Myu en tout cas, elle était... A croquer. Il s'approcha d'elle avec un petit sourire, un petit gargouillement réveillant son estomac.

- Bonsoir mademoiselle, et bien on se balade?

Elle se mit immédiatement sur la défensive :

*Qui c'est, qu'est ce qu'il me veut? J'ai déjà l'impression d'être suivie depuis tout à l'heure, et maintenant voilà qu'un gamin m'aborde... Du calme Lucia, ce n'est justement qu'UN gamin.*

Myu sourit de plus belle en lisant ses pensés :

- Ne craignez rien, je ne vous veux pas de mal, je me baladais simplement sous cette magnifique lune, tout comme vous.
- Dis voir gamin, t'es pas un peu jeune pour trainer dehors à cette heure-ci et draguer une femme?

*Voilà c'est mieux ça, comme si j'allais avoir peur d'un gosse*
*Un gosse plus vieux que toi tout de même beauté*

- Il n'y a pas d'âge pour faire la cours a une aussi merveilleuse créature.

*Flatteur ce gamin*

- Est-ce que cela vous dirais d'aller prendre un verre?

*Il exagère peut-être un peu, il est pas né le temps où je me tapperai un gosse, surtout un qui se trimballe un truc à poil autour du cou*

Myu fronça les sourcils, Lulu-neuf n'était pas un "truc à poil" mais une très belle fouine âgé de deux mois et demi. Le garçon avait tout d'abord voulu faire ami-amie avec cette très jolie jeune femme, mais ces pensés là venait de l'en dissuader, il prit une mine boudeuse, tant pis il avait faim et n'allait pas se priver de nourriture.

- Bon j'arrête de jouer, c'est plus drôle.
- Hein?

Myu se mit à rire amusé par cette réaction stupide et attrapa la jeune femme par le cou sans qu'elle n'ait pu faire un geste. Elle prit peur et hurla, mais il posa une main sur sa bouche.

- Je déteste le bruit, alors silence s'il te plait.

Puis il s'approcha de son repas avec un grand sourire, ouvrit la bouche et...

*Laisse là... S'il te plait*

Myu se retrouva complètement paralysé par la voix dans sa tête. La fllle en profita pour se débattre et le repousser. Le garçon reprit ses esprits et secoua la tête un peu déboussolé, sa proie était entrain de s'enfuir, mais il n'y prêta guère attention et se tourna de l'autre côté, où un homme le fixait. Etait-ce lui qui l'avait paralysé de cette manière? Myu essaya de capter ses pensés, mais impossible d'entrer dans l'esprit de ce type. Il trouva cela amusant :

*Il a peut-être la tête vide éhéhé*

L'autre ne s'occupa pas vraiment de lui et d'une vitesse trop rapide pour être humaine rattrapa la fille et la stoppa.

- Hey tu es un vampire toi aussi et...

En entendant ces mots la fille se remit à hurler et Myu ne termina pas sa phrase se plaquant les mains sur les oreilles, décidément encore trop sensible au bruit :

- Fais la taire !!!!!!!!!!

Ambiance

Une main glacée s'élève vers le visage de la jeune femme, en proie à une grande agitation. Elle se débat comme un beau diable, hurlant aussi fort qu'elle le peut tout en fixant cette peau si lisse et brillante avec les yeux de la terreur la plus profonde. Les longs doigts du japonais glissent le long de sa joue en une douce caresse. Malgré sa peau de glace, c'est une impression de chaleur qu'elle ressent, Saniiro, ancré en son esprit.

Cependant, une part de lui reste fixé vers l'impudent qui s'apprêtait à lui prendre sous le nez cette femme qu'il piste depuis la tombée du jour, ombre dans les ténèbres, imperceptible, attendant le bon moment pour fondre sur sa proie.

*Elle est à moi, tiens le toi pour dit !*

Déjà, elle se calme, cessant soudain de hurler, comme si elle venait d'avoir une révélation. D'elle même, la malheureuse se retourne pour observer les traits de celui, qui, elle en est persuadée à présent malgré les mots de son précédent agresseur, est son sauveur.

*Tu es télépathe... bien... au lieu d'essayer de lire mes pensées ou d'envisager de m'immoler, observe les siennes... et apprends.*

Sa poigne se relâche sur les épaules de la passante, certain qu'à présent, prisonnière de son aura séductrice, toute idée de fuite s'est évanouie en elle. Délicatement, il vient replacer une mèche derrière son oreille, échappée de sa soyeuse chevelure alors qu'elle se débattait. A ce geste, un sourire fleurit sur ses lèvres, le regard plein de reconnaissance et d'admiration.

Voilà qui est mieux... Vous êtes si belle lorsque vous souriez Lucia... Si délicate...

Le charme ténébreux du chasseur se déploie, lentement, assurément. Pas un de ses gestes, pas plus que de ses mots n'est vain. Chaque action est étudiée, calculée, rien n'est inutile dans tout ce qu'il effectue. Le temps d'une seconde, ses yeux sombres croisent ceux de Myu, le jeune vampire se tenant là, immobile, comme fasciné par les pensées de son ex future victime, à présent empli de la présence du chasseur qui la tient entre ses bras.

Lucia... la Lumière... Avec un tel prénom, vous devez illuminer de votre présence vos proches...
Pas vraiment non...

L'hésitation, le doute s'entend dans ces trois mots, prononcée d'une voix timide.

N'avez vous jamais été éclairée par la présence de quelqu'un ?
Jamais avant cet instant...

La timidité fait monter le rouge sur ses joues alors qu'elle baisse les yeux, pleine d'une soudaine pudeur. Un rire léger mais dénué d'émotion fait frémir les épaules du vampire millénaire. Honnête, il la contredit, toujours aussi prévenant, prenant garde à ne rien dire qui puisse faire fuir son sourire.

Je ne suis pas, à proprement parler, un des êtres dont je parle...
Pourtant... Vous êtes si... comme un apparition !

A nouveau ce rire, presque mécanique, celui d'un homme depuis bien longtemps rompu à ce genre de conversation, que plus rien ne surprend, que plus rien n'émeut.

Voulez vous que je vous montre ce qu'est la véritable lumière Lucia, la votre ?

Un hochement de tête marque son assentiment. Tout en elle montre à présent sa curiosité alors qu'il plonge la main dans sa lourde chevelure, mettant à bas les quelques épingles qui les retenaient.

Laissez moi vous embrasser...

De son autre main, il chasse les mèches le gênant dans son but, son cou aux tendres arrondis.

... Juste ici... Regardez La, vous n'allez pas tarder à la voir...

Effectivement, alors qu'il respire son parfum, si humain, avant de planter ses canines effilées dans la chair tendre, elle ne ressent qu'un instinct la douleur, moins qu'une piqure, pour plonger dans une ivresse et une félicité sans nom.

Ses yeux s'écarquillent tandis qu'il draine à petites gorgées son sang, savourant ses arômes et la vie qu'il porte à chaque goutte aspirée. Quiconque n'a jamais perdu une grande quantité de sang ne peut savoir ce qu'elle ressent en cet instant, lui s'en souvient comme si cela c'était passé hier et se ferme à ses pensées, connaissant son émerveillement.

Devant le regard de la jeune femme, les lumières alentours deviennent floues, comme perçues au travers d'un brouillard cotonneux. Toujours cette pulsation, puissante, primaire, là où les lèvres de son bourreau se sont posées, qui la guide, lui permet de garder les paupières ouvertes, se fixant à ce rythme comme une noyée à la bouée qu'on lui tend.

A présent, les lueurs, semblables à une nuée de lucioles dans l'obscurité, se rassemblent pour ne former plus qu'un grand écran iridescent qui s'abat devant ses yeux, la noyant dans la lumière la plus vive et la plus pur qu'elle ait jamais pu contempler.

Elle ne s'en rend pas compte, mais ses jambes ont lâché depuis longtemps, son corps reposant à présent au creux des bras de Saniiro, poids qu'il perçoit à peine, étanchant sa soif avec une lenteur calculée, savourant toujours cet instant où, tel un oisillon pris au piège, le cœur s'affole. Juste avant qu'il ne s'arrête, la pression de sa bouche se détache.

Sa paume caresse le menton de Lucia, au bord de l'inconscience, incapable de percevoir autre chose que sa caresse et le froid qui la prend de l'intérieur, l'envahissant, mais aussi celui qu'il dégage, malgré sa peau de glace qui se réchauffe par le repas qu'il vient de prendre.

L'effleurement de l'homme devient mouvement sec, brisant les vertèbres d'un geste avant de laisser le corps inerte, mort, heurter le sol dans un bruit sourd. Dos à Myu, il le sent autant qu'il l'entend se rapprocher mais l'arrête d'un geste pour reculer et gagner ses côtés.

Tu vas la laisser là ?

A peine a-t-il eu le temps de prononcer ces quelques paroles que le cadavre s'embrase dégageant une chaleur extrême, supérieur à tout ce que l'on peut imaginer, même pour le jeune pyrokinésiste à ses côtés. Quelques secondes à peine s'écoulent avant qu'il ne reste plus rien de celle nommée Lucia, en dehors de cendres, déjà éparpillées par la brise nocturne et d'une petite mare noirâtre sur le goudron de la ruelle, résidus graisseux.

La Nouvelle Orléans est ma ville, n'envisage plus jamais de recommencer cela... me prendre ma proie !

En dépit de la fermeté de ses mots, son ton est toujours aussi neutre, froid, exempt d'émotion, ainsi que son regard qui se pose à présent sur le coréen, l'examinant des pieds à la tête.

Musique

Myu n’avait pas pu s’empêcher de passer sa langue sur ses lèvres alors qu’il regardait l’autre vampire lui voler sa proie, miam qu’est ce que ça semblait bon. Mais il ne bougea pas, après tout il avait complètement perdu sur ce coup là, il était certain que l’homme était bien meilleur dragueur que lui. On ne reprend pas la proie d’un très bon dragueur. Cela le faisait sourire jusqu’aux oreilles, il devrait peut-être lui demander quelques techniques, pour que même ce genre de femme s’intéresse à sa bouille de gosse. Quand l’homme en eut finis avec mademoiselle, l'adolescent s’approcha enfin se demandant bien ce qu’il allait faire de cette jolie victime morte. Quand l’autre utilisa la pyrokinésie pour se débarrasser du corps, Myu laissa échapper un sifflement admiratif, ses pouvoirs lui semblaient ridicules à présent. Certain que ce vampire était cent fois… Même mille fois plus fort que lui, il se sentit très enthousiaste.

*C’est un peu comme si je rencontrais une star, ouais la super star des vampires eh ! En tout cas il est hyper fort*

Quand la super star justement lui demanda de ne plus s’en prendre à sa proie, Myu se mit à rire :

- Eh ! Tu devrais les étiqueter, comme ça la prochaine fois je saurai qu’elles sont ta propriété

Il finit sa phrase avec un clin d’œil. Puis reprit :

- Alors toi aussi t’es un vampire ? En tout cas t’es carrément super trop fort. Je regrette de pas avoir de papier et de stylo, je t’aurais demandé un autographe. Ah au fait moi je m’appelle Myu Myu. Myu c’est mon prénom, et Myu mon nom. Tu peux m’appeler Myu Myu, ou juste Myu, comme tu veux.

Puis il prit sa fouine dans ses mains et l’approcha du visage de l’autre vampire :

- Et ça c’est Lulu-neuf. Lulu comme Lune, et neuf parce que c’est la neuvième du nom. Elle est belle non ? Elle a juste deux mois et demi. Et toi c’est quoi ton nom ?

Le gamin de 209 ans attendait une réponse tout sourire, content de se faire un nouveau pote, et puis un pote vampire super star c’était trop la classe, il allait pouvoir se vanter auprès de… Enfin auprès de sa futur victime quoi. Parce que Myu avait pour habitude de finir par bouffer tous ses copains -les humains en tout cas.

- Saniiro Shota…
- Cool ! Monsieur Saniiroshota, enchanté de faire ta connaissance. Alors ça te fais quel âge ? Nooon laisse moi deviner… Au moins 1000 ans ? Peut-être plus ? Moi j’ai 209 ans… Bon en fait je triche parce que mon anniversaire est en juillet, ça m’en fait que 208, mais 209 ça sonne mieux. J’aime bien compter mon âge, ça sera cool quand j’aurai 1000 ans, je pourrai me dire « ouah j’ai vécu 1000 ans », je serai un millénaire à moi tout entier. Et toi ça te fais quoi ? Je veux dire c’est cool non de vivre aussi longtemps ? La classe l’immortalité. Dommage qu’on puisse pas la passer sur une plage ensoleillé avec tout pleins d’humains à croquer, mais bon, la nuit c’est bien aussi, même si bien sûr ils sont moins nombreux sur la plage.

Et blablablablablabla… Myu quand il était partit était difficile à arrêter, et puis il avait tellement de trucs à dire, à raconter, encore plus à cette nouvelle connaissance qu’il ne connaissait pas.

- Au fait je peux t’appeler Sanii ? Ou alors hmm Sho ? Parce que Saniiroshota c’est carrément trop long. D’ailleurs c’est ton prénom ou ton nom ? Bon c’est décidé je vais t’appeler Sho-nii, ça sonne méga bien je trouve.

Et en plus de causer, causer, causer sans arrêt, il était complètement à côté de la plaque. Souriant à tout bout de champ, heureux de s’être fait un nouvel ami - car il était persuadé bien sûr que l’autre était maintenant son ami, sans même lui demander son avis.

Ambiance

Toute personne autre que lui aurait probablement soupiré suite à cette tirade épuisante de banalités du petit vampire qui lui fait face. Cependant, l'éternel guerrier, lui, maintient son flegme habituel. Si le vent ne faisait pas claquer son long manteau de cuir noir, il aurait eu toutes les chances de passer pour une statue égarée en ces lieux.

Comme toujours, et plus encore depuis que ses capacités mentales ont été augmentées par sa transformation, sa pensée s'est séparée sur plusieurs plans. Une infime partie écoute ce qu'il considère de plus en plus comme un nuisible de plus dans les rues de cette ville qu'il aime tant. Une autre revit l'instant si délicatement exquis qu'il vient de vivre, repassant le film des pensées de sa victime à l'approche de sa fin comme le plus grand chef d'œuvre de sa vie.

Et ainsi de suite, les sujets auxquels il songe allant du plus petits bruits de rats, quelques centaines de mètres à l'ouest, signe d'un cadavre... à examiner avant de repartir pour vérifier qu'il ne s'agit pas d'un nocturne imprudent semant ses traces. Cependant, presque inconsciemment, un fragment de son cerveau s'attarde sur quelques mots du coréen...

*Et toi ça te fais quoi ? Je veux dire c’est cool non de vivre aussi longtemps ? *

Ces paroles, il les tourne et les retourne, jusqu'à ce qu'elle monopolise sa réflexion entière, obsédante litanie, question à laquelle, pour une fois, il ne trouve pas de réponse véritable. Enfin, quelques secondes s'écoulent avant qu'il ne réalise qu'enfin le babillage s'est arrêté... vraisemblablement dans l'attente d'une réponse de sa part, probablement pour le relancer plus en avant dans son monologue insipide.

D'ordinaire, il le sait, il aurait déjà disparu sans laisser de trace, laissant là ce jeune vampire, évitant ainsi la tentation d'en finir avec lui, créature inutile à ses yeux vu ce qu'il lit en sa tête, voir dangereuse de par son égoïsme et son inconscience...

Froidement, sans se presser, son regard de cobalt coule jusqu'à lui, imposant le silence à son vis à vis par ce seul coup d'œil, dénué de toute émotion, chose rare, même chez un vampire. Sa voix résonne, pleine de notes mélodieuses malgré leurs reflets métalliques, comme ceux d'un robot, probablement du à cette absence d'humanité qui le caractérise aux yeux de beaucoup, humains ou non.

Je fus baptisé Saniiro à ma naissance. Shota est le nom que je porte pour l'instant.

Chacun de ses mots est articulé avec soin, comme s'il craignait que son interlocuteur n'en saisisse pas bien le sens. Cependant, la suite de son discours, c'est par la pensée qu'il le transmet, toujours aussi prudent lorsqu'il s'agit de sujet aussi peu... commun. Le temps lui a appris qu'en dépit de ses pouvoirs, il n'est jamais à l'abri d'une oreille indiscrète et son quota de mort est atteint pour la soirée.

*J'ai 1240 ans. Un point c'est tout. Cela ne me fait ni chaud ni froid. Quant à tes idées de « superstar vampire » ôtent les de ta tête shounen. Si je suis parvenu à cet age, c'est justement en sachant me faire aussi discret que les ombres que nous peuplons. Être le cœur de l'attention lasse vite le plus jeune des esprits...*

Soudain, son corps se met en mouvement, sans prévenir. Chaque geste est calculé, aucun n'est inutile, comme ses mots, économie apprise avec l'âge chez un être ayant déjà connu et vu tout ce qu'il pense possible, n'étant plus surpris de rien. Avec lenteur, pour lui du moins, il se détourne, prêt à s'enfoncer dans le silence de la nuit, lorsque, tout à coup, sans vraiment savoir pourquoi, il interrompt son avancée et lance par dessus son épaule, sans se retourner.

Ne prend pas la peine de retenir mon nom, comme je ne retiendrais pas le tien, peu importe, tu n'auras jamais l'occasion de m'appeler.

Tout en prononçant ces mots à voix haute, d'autres paroles s'insinuent dans l'esprit de Myu, insidieusement, sur un ton indifférent, même si leur auteur a bien perçu le manque que le soleil cause chez le jeune solitaire.

*Les levés et couchés de soleil sur le Bayou sont sublimes... Peut être le sauras-tu dans mille ans... ou jamais, comme je le pense...*

Musique

Myu s’était transformé en poisson. Une sorte d’énorme carpe. Ce qui était assez original de sa part puisqu’il était rarement muet et qu’il était difficile de lui rabattre le clapet sauf quand il mangeait. Sa manière d’ouvrir et de fermer la bouche sans qu’aucun son ne sorte, lui donnait cet air de sortir tout droit de la mer. Une carpe avec les cheveux teints, mais une carpe quand même, et il était persuadé que s’il avait pu réellement se transformer en animal, c’est exactement ce qu’il serait devenu.

Pourtant tout allait bien il y avait quelques secondes encore. Sho-nii, car Myu avait déjà adopté ce surnom, lui avait expliqué en parole et en pensé que Saniiro était son prénom, Shota son nom du moment, qu’il avait 1240 ans…

*wouah la vache*

Qu’il s’en fichait, qu’il n’était pas une super star vampire –ce que Myu réfuta, parce que pour lui il était clair qu’il en était une – et que pour arriver à un âge si avancé il s’était montré discret. Le garçon trouvait ça encore plus cool, une super star vampire discrète, c’était comme un espion super dangereux, la classe.
En tout cas il y avait une chose dont Myu était sûr, c’était qu’être au cœur de l’attention ne le dérangerait pas du tout lui, et qu’au contraire il faisait tout pour devenir le centre du monde.

- D’acc Sho-nii t’es pas obligé de te souvenir de mon nom, pourtant ce n’est pas bien compliqué hein ? mais moi je me rappellerai du tien… Au moins quelques centaines d’années du moins.

Il lui criait ça alors que l’autre s’était détourné et commençait à partir, lui indiquant qu’il n’était pas obligé de se souvenir de comment il s’appelait.
Mais c’est alors que l’homme lui transmit quelque chose… Une révélation coupable de l’état de carpe de Myu.
Il finit quand même par se reprendre et réussit à articuler :

- Oh mon Dieu… Si toutefois il y en a un… Tu veux dire que… Que…

*Impossible, tu peux aller au soleil ?*

Il n’avait pas pu continuer en parole, mais ses pensés exprimaient très bien sa surprise et son envie.

- Tu veux dire que si j’attends encore je pourrai y aller aussi ? Si je vis 1240 ans ? AHAHAHA mais c’est génial ça. Pourquoi jamais ? Bien sûr que je le saurai, si toi tu le peux, je dois le pouvoir aussi ! Donne-moi plus de détails, dis-moi… C’est comment de pouvoir voir le lever et coucher du soleil ? Tu peux sortir en pleins jour ? Tu ne peux pas partir avant de m’avoir raconté.

Un désir brulant s’emparait de l’être de Myu, son état de carpe avait complètement disparu, il avait tellement de chose à dire, à demander.

- Je ne me souviens plus du soleil. Plus trop. Je ne pensais pas que c’était important quand j’étais en vie alors j’y ai jamais fais gaffe. Juste que c’est gros, jaune et que ça va me tuer si je mets le nez dehors en pleins jours. Mais j’ai lu des livres, et j’ai vu des photos, et j’adore cette manière qu’il a de tout faire apparaître différemment, de réchauffer, aaah je t’envie… Je ne sais pas si j’aurai la patience d’attendre mes 1240 ans. Comment ça fait ? Et pour un vampire ? Quelle sensation as-tu ressentis ? Et tu as survécu ? Mais c’est tellement génial !!!! Oh s’il te plaît raconte moi tout.

Myu s’approcha de lui, puis fit un geste pour lui prendre son bras, mais l’autre esquiva :

- Oh s’il te plaît, raconte moi, viens on va s’asseoir dans un bar super sympa et tu me diras tout okay ???

Puis il joigna ses mains en signe de supplication, afficha un petit sourire désireux, des yeux pétillants, et une bouille des plus adorables – à laquelle le plus souvent il était difficile de dire non.

Ambiance

Lente et sourde, une vague de colère enfle au fond du japonais. La longue habitude la retient là où d'autres n'auraient pu qu'exploser depuis longtemps. Tout en ce jeune vampire lui donne des raisons de l'exécrer. Sa façon d'être, de demeurer... de survivre même. Ses questions, si horripilantes tant elles touchent la corde sensible au fond de lui et font naitre une nuée d'interrogations dont il se passerait bien...

Son ton est sec, mordant, dénué de sympathie, preuve que les mimiques et supplication de Myu n'ont aucun effet, si ce n'est l'inverse du recherché sur lui.

Tu n'as donc aucune fierté pour te comporter tel un chiot ? Et encore... j'ai eu des chiens plus dignes que toi !

Blesser, faire mal, détacher, pour mieux s'éloigner... Déjà l'amertume et le regret envers son propre orgueil de n'avoir pu abandonner sa proie aux mains d'un autre... Ce qui lui aurait éviter tout ces désagréments si fâcheux auxquels il semble ne pouvoir échapper à présent !

Sans prévenir, une main vient se plaquer sur le haut du torse du coréen, le soulevant de sol pour le maintenir contre le mur, légèrement surélevé par rapport aux yeux de Saniiro.

*Ouvre grandes tes oreilles car je ne le répéterais pas !*

Sa pensée s'infiltre, serpent dans l'esprit malléable à ses yeux du jeune qui lui fait face. Il ne lui fera rien, l'autre le sait, le sent, se laisse aller contre le mur, indifférent, les yeux grands ouverts devant cette sorte de super vampire qu'il se figure devant lui. Il sent ce cerveau immature jubiler plus que jamais de son immortalité, lui ôtant toute peur. La fouine s'accroche au col de son maitre, malheureuse créature ne comprenant pas cette soudaine surélévation par rapport à sa hauteur moyenne de voyage ordinaire.

Je vais te donner la principale raison pour laquelle tu ne reverras jamais la lumière du jour : tu es et seras à jamais un pauvre vampire immature, se gaussant de ce qu'il est sans même respecter sa propre nature, sans connaitre la valeur du sang qui lui a été donné, bien trop facilement d'ailleurs !

Soudain, le plus âgé des immortel semble comme dégouté de ce contact et se recule brutalement, laissant Myu se remettre sur ses pieds, aussi insouciant en apparence qu'avant.

Plutôt que d'utiliser inutilement tes pouvoirs, tu ferais mieux de te renseigner sur leur origine et peut être comprendras tu la différence entre toi et moi...

La puissance et la pureté du sang maléfique en lui brille plus que jamais au fond de ses prunelles. De cela, il s'est rarement vanté, et à raison... Pour la plupart des mortels, devenir vampire donc immortel est une fantaisie, un avantage... Tout comme, certainement, pour celui ci, devant lui qui a du accueillir sa transformation avec joie.

A vrai dire, encore un siècle auparavant, il n'aurait peut être pas tenu ce discours ... mais une rencontre a tout changé dans sa façon d'être, d'aborder son éternité... sous un nouveau jour, non plus celui sous lequel son vis à vis la voit mais bien sous le coup de la malédiction.

Tu veux savoir ce que cela fait d'être si vieux ? Soit!

D'un geste ferme et précis, le japonais réajuste le col de son long manteau de cuir, démis par le geste de violence gratuite qu'il vient d'avoir. Aux images qui lui traversent l'esprit, il refuse l'accès à sa pleine conscience, les refoulant au plus profond de lui... ce visage... cette voix... ce parfum... Son parfum...

Sais tu ce qu'est aimer ? Au delà de toi même et de ta propre existence ? Peux tu seulement imaginer ce que cela représente de voir l'être que tu aimes le plus au monde vieillir et mourir alors que, toi, à jamais, tu seras tel que tu es ? Penser dès les premiers instants que tu es voué à le regarder mourir, sans rien pouvoir y faire, si ce n'est partager notre malédiction ?

Une main aux doigts longs et fins se passe dans sa chevelure mi longue, la ramenant d'un geste lasse en arrière, pensif.

Mais ce n'est pas aimer que de faire cela... et toi, tu dois continuer à vivre... Enfin... toi ... non ...mais moi... pouvoir contempler le soleil est une malédiction de plus... m'ôtant le seul moyen de mettre fin à tout ceci, ni plus, ni moins.

A mesure de ses mots, il s'est reculé de plus en plus, jusqu'à disparaitre dans les ombres du mur opposé, guettant la réaction du jeunot, partagé entre l'idée de l'avertir des dangers de son comportement et l'envie de fuir, loin, chez lui, pour retrouver Son souvenir....

Musique

- Wouf !

Il n’avait pas pu s’en empêcher, le crie de l’animal était sortit de sa bouche alors qu’il essayait de le retenir depuis que Sho-nii l’avait traité de chiot. Oui bien sûr il avait écouté tout son discours, il s’était même particulièrement montré attentif à son ainé quand celui-ci l’avait soulevé du sol, mais impossible d’oublier ce wouf qui ne demandait qu’à sortir de lui. Et voilà c’était fait, simplement, bêtement, une véritable pulsion.

Oh oui il était immature, trop avide de sa propre vie, égoïste envers tout le monde, complètement à côté de la plaque sans doute, utilisant inutilement ses pouvoirs comme un gosse à qui on donne un super jouet.

- J’ai aimé ma mère.

Ca aussi c’était sortit tout seul. Avec la même intensité que son crie de chiot.

- Vraiment. Si y a une personne que j’ai aimé dans ce monde c’est ma mère, d’ailleurs c’est bien une des rares choses dont je me souviens de mon vivant, elle. Puis je suis devenu un vampire et je l’ai vu vieillir chaque jour. Et elle est morte et voilà. Point final.

C’était vrai, il ne s’était pas vraiment sentit triste quand il avait compris le décès de celle qui l’avait mis au monde, qui lui avait donné ce don si précieux dont il se délectait chaque jour ou plutôt chaque nuit : la vie. Et pourtant jamais il ne l'oublierait, et toujours il éprouverait de l'amour pour elle, ainsi que beaucoup de respect.

Myu sourit, puis essaya de détendre l’atmosphère grâce à son pouvoir, il doutait d’atteindre vraiment la super star vampiresque, mais il pouvait toujours essayer. La détente c’est important, sinon on finit par devenir tout ridé autour des yeux et ça fais carrément laid. Et ça même un immortel n’y échappe pas.

- Et j’aime Lulu-neuf. Mais si elle mourrait, suffirait que j’ai Lulu-dix et voilà. Cela n’a pas réellement d’importance si je suis vivant. Parce que si je suis vivant alors je peux rencontrer qui je veux, voir pleins de choses différentes, j’ai le temps pour tout et à la fois pour rien parce que même en étant immortel tout change tout le temps.

Trois secondes de silence, juste parce qu’il hoche la tête convaincu de ce qu’il dit et réfléchissant à ce qu’il va ajouter :

- Tu peux voir le soleil et tu te plains ? Hey tu es dark vampire ou quoi ? Je ne sais pas qui t’as aimé ou chépa quoi, mais si toi t’as la chance d’être en vie faut en profiter. Combien de mort rêverait de prendre ta place à ton avis ? Pleins j’en suis sûr. Je sais pas si je mérite d’être un vampire ou non, en tout cas on m’a transformé parce que je tenais à la vie plus qu’en n’importe quoi d’autre. Et je laisserai personne me prendre ce goût à la vie, peu importe si je l’aime, je l’aimerai jamais au point de vouloir en crever, je l’aimerai au point de vouloir continuer à vivre c’est tout.

*Et tu vas me dire que je parle sans savoir, que je suis un gamin immature, blablablabla, tes trucs d’ancêtres je connais ça*

Il commença à enchaîner paroles et pensés, ayant trop de choses à raconter.

- Moi quand je serai vieux, je serai content d’être arrivé jusque là et je ferai une petite fête en mon honneur. Après je continuerai à vivre pour aller encore plus loin.

*Tellement loin que je pourrai faire bronzette sous le soleil sans risque*

- J’aurai peut-être Lulu-trois-mille-cinq-cent-quatre à ce moment là, qui sait ? Et peut-être que moi aussi j’aurai aimé quelqu’un si fort, si fort, que ça serait quelqu’un que je n’aurais pas tué, qui mourrait peut-être bêtement en glissant sur une peau de banane et en s’empalant dans un fil barbelé. Je serai sûrement triste et morose au point de ne pas manger pendant quatre jours. Puis la vie reprendrait son cours, point. Si cette personne m’aime comme je l’aimerai, alors elle sera sûrement heureuse de savoir que je vis encore avec le sourire.

*Mais toi t’es tellement morose que tu ferais déprimer un clown*

Puis silence de quelques minutes, Myu alla chatouiller le dessus du crâne de sa fouine, cette dernière venant se caler sur son bras pour avoir plus de caresses. S’occupant de Lulu-neuf avec cette tendresse dont il pouvait faire preuve envers cet animal qu’il adorait, il eut un sourire qui indiquait à quel point il était heureux. Heureux de pouvoir cajoler Lulu-neuf, heureux de profiter de ce qu’on lui a donné, de cette vie qui lui permet de pouvoir caresser la tête de son furet, pas grand-chose, mais un véritable bonheur pour lui.
Et doucement il reprit :

- N’es-tu pas immature aussi à vouloir redonner le cadeau qu’on t’a fais sans même essayer de comprendre la vraie valeur de la vie.

Il lui jette un coup d’œil. Son sourire s’est effacé, juste l’espace de deux secondes, mais son regard si sérieux à cet instant montre que Myu n’est pas aussi idiot qu’il le paraît, pas si immature qu’il le montre. Puis il regarde de nouveau sa fouine, un sourire énorme vient se coller sur son visage, une dernière pensée résonne :

*Mais si aimer rend aussi déprimé, je n’aimerai jamais*

» Myu Myu et Lulu-neuf
» Un moment dans le passé de Myu Myu (et de Lulu-sept)
» Les Vampires
» La Lune et les étoiles...